samedi 24 septembre 2011

lune et soleil

Quand il fait nuit parfois, je regarde le ciel, et dans le ciel de velours noir je cherche toujours la lune.

Qu'elle est belle, qu'elle est belle quand elle brille, en sourire ou en clin d'oeil... cette face ronde et familière alliée, parfois rousse parfois blonde et souvent d'argent, en robe d'argent rose ou d'argent gris... parfois brouillée, une noix de beurre sur une tartine de nuages... parfois tranchante, tant elle est vive, et ces soirs-là elle me fait un peu peur, j'ai peur que mes rêves ne s'y coupent les ailes, mais j'aurais bien envie pourtant d'y accrocher mon écharpe la nuit... parfois ronde, comme la face familière de nos dessins d'enfant, parfois gommée sur les coins, car son cycle n'a pas tout à fait fini de la dessiner, et je crois que c'est comme ça qu'elle m'amuse le plus, parce qu'elle me nargue, j'ai envie de prendre mon pinceau pour l'arrondir... et tantôt fine tantôt dodue, j'en parlerais volontiers à son diététicien...
Elle est toujours là, mais on ne la voit pas toujours. Parfois c'est parce qu'elle joue à cache cache avec les nuages, et on finit toujours par la retrouver. Mais parfois elle brille par son absence, une fin du monde passagère, un ciel tout noir, il manque quelque chose, elle est là, bien sûr, mais c'est comme si elle n'était plus là, elle sait se faire désirer...Toujours différente, toujours belle.... d'argent souvent, d'or parfois, et satinée ou soyeuse quand elle le veut...

C'est le soleil qui la rend belle à regarder, parce que c'est lui qui la fait briller. Ses rayons l'atteignent et elle les réfléchit à sa façon. Toujours différemment et joliment, et toujours grâce aux rayons émis par le soleil... La beauté du soleil c'est sa chaleur émise et la constance de la chaleur émise, la générosité de sa chaleur. La beauté de la lune va main dans la main avec la chaleur du soleil. C'est ce que je me dis parfois quand je suis assise sur un banc et que je laisse le soleil me réchauffer la peau, et que c'est une sensation vivante magnifique, et qu'en plein jour et en pleine lumière la nuit et le froid paraissent inimaginables, à peine une vue de l'esprit, à peine envisageables.

C'est le soleil qui révèle la beauté de la lune, ce soleil qui brille tellement, tellement trop fort pour mes yeux, ce soleil qui me brûle les yeux si je le regarde (et je me souviens clairement de mon père quand j'étais petite m'interdisant formellement de regarder le soleil). On voudrait, mais on ne peut pas regarder le soleil de face en plein jour alors qu'il est juste là au-dessus. La nuit pourtant, on peut le regarder et le voir, grâce à la lune.
Alors je souris. Parce que j'aime bien les paradoxes, déjà ; et puis aussi surtout parce que je me dis que le soleil doit être fier de révéler la beauté de sa lune. Et la lune fière de rendre visible l'éclat de son soleil.

un samedi matin parisien

Dix heures du matin samedi, devant le pub irlandais, et porter un habit bleu, voilà c'était ça les consignes.

Alors j'ai retrouvé mes amis dans un pub tout sombre, on a eu l'embarras du choix pour la table, on s'est assis, et ça n'a pas tardé. Ça a commencé à se remplir, petit à petit. On a tous voulu commander, pour moi un chocolat chaud de petit déjeûner, pour les autres déjà une guiness. Ça parait surprenant, et en effet, je ne sais pas comment ils font, mais les circonstances s'y prêtaient. Les tenants du bar n'ont d'ailleurs pas tardé à dérouler les grands écrans blancs. Donc ceux qui étaient mal placés se sont mis plus en face, moins loin, moins de côté, plus au milieu du chemin, dans un brouhaha et une cohue, les serveurs ont du adorer, surtout qu'à ce stade c'était déjà assez plein pour que chaque déplacement relève du zig zag avancé.
En attendant le début pour passer le temps et les nerfs, nous avons spéculé sur les enjeux, la stratégie, pourquoi c'était important et puis aussi pourquoi ça ne l'était pas tellement non plus. Puis il y eu les pubs et les débats entre amis pour connaître la valeur d'un spot à cette heure là.
Et puis ça a commencé.

Hélas!
Les bleus ont quand même perdu le match de rugby contre les All blacks. Malgré tous nos efforts!!
C'est pas faute pourtant d'avoir été vêtus de bleu.
C'est pas faute d'avoir méticuleusement englouti le brunch exceptionnellement protéiné et gras, des saucisses de toutes les couleurs, des boudins de toutes les couleurs, et des légumes quand même, des patates complètement frites et plus salées que la mer morte... Je crois qu'en fait nous mangions pour les joueurs!!
C'est pas faute d'avoir sanctionné chaque décision de l'arbitre (qu'elles fussent justes ou injustes n'a pas été le soucis principal) par un soulèvement général et par des poussées de jurons des membres les plus actifs de l'auditoire
C'est pas faute non plus d'avoir réveillé toute la rue qui essayait peut-être de profiter d'une grasse mat de weekend par les hurlements bien trop aigus à chaque fois que les joueurs de notre camp s'approchaient des deux gros poteaux au bout du terrain
Et ce n'est pas faute, pour finir, d'avoir applaudi aussi les buts des autres joueurs, par esprit de camaraderie fair-play certes, et puis aussi par ignorance aussi des règles du jeu pour un certain nombre d'entre nous.

Est-ce que j'y retourne la semaine prochaine? J'hésite encore.
C'est vrai que ca a un côté fascinant de voir que des gens continuent de courir après le ballon alors que tous les joueurs de l'autre équipe semblent leur tomber dessus comme une pluie de grêlons dès qu'ils s'en approchent, et je me dis quand même ca doit être un peu douloureux  parce qu'ils ont tous un gabarit d'armoire à glace, dans le genre costaud et que quand on les regarde de près, ils n'ont pas l'air commode, même ils tirent la langue au début quand ils dansent. Parfois le ballon disparait sous un tas de bras et jambes emmêlés et il réapparait complètement de l'autre côté et c'est émerveillant.
Sans doute ça le serait moins si je comprenais un peu mieux les règles. Sans doute je pourrais me renseigner, mais devant le match ne paraissait pas un lieu propice à la question.
Et puis le chocolat chaud n'était pas très crémeux. Mon lait avait moins de mousse que la guiness de mes voisins...
En même temps, l'expérience était galvanisante et il y avait plus d'ambiance que dans un salon de thé. Et ça, c'était chouette. A la fin du match, tout le monde s'est serré la main, parce que nous avions tous vécu un moment ensemble, avant de retourner au ciel bleu d'un weekend qui ne faisait que commencer. Et ça, c'était vraiment chouette aussi.

lundi 12 septembre 2011

un lundi normal de septembre

Juste une journée tranquille, aujourd'hui
un lundi normal de début septembre
les premières odeurs d'automne
et la lumière mordorée qui annonce la fin de l'été
il va falloir que je file au parc avec mon appareil photo
les mille feuilles au sol
les premières journées d'école des enfants
qui conquièrent les trottoirs et les boulangeries du quartier au sortir de l'école
les fashion week d'automne, quelles couleurs cette année?
les bonnes résolutions
les souvenirs de rentrée
etcaetera
non, vraiment, j'ai beau chercher
rien de très spectaculaire aujourd'hui
juste une quiète journée d'automne
et un peu de soleil en bonus entre midi et deux
un luxe extraordinaire :)

dimanche 11 septembre 2011

le dimanche, c'est brunch

C'est dimanche, c'est brunch, toujours les mêmes amis, que je revois avec plaisir presque toutes les semaines. On change d'endroit, selon l'humeur, la saison, la température, les modalités pratiques d'usage, géométrie variable. Mais il y a les constantes. Les nouvelles des uns et des autres, absents ou pas, nouvelles de première main ou pas, parfois ça se rapproche un peu du ragot et parfois ça me gêne un peu même si c'est toujours affectueux. On se coupe la parole, on se dispute pour de rire, impossible de poursuivre son point jusqu'au bout, et si on se tait c'est juste parce qu'il faut bien un peu s'occuper des croissants, des œufs brouillés avec le lait et la ciboulette, et boire un peu de café pour garder la forme, ou reprendre de la salade de fruits parce que c'est plein de vitamines, on se relaie les uns les autres pour les questions les réponses les contradictions... même si c'est quand même généralement les mêmes qui lancent les sujets, les mêmes qui modèrent les propos ou qui vont rechercher du café quand les affaires se corsent un peu trop.
On teste différents endroits dans Paris, différents quartiers, ça prend souvent toute la semaine pour se mettre d'accord sur l'endroit du dimanche. Mais ce que je préfère c'est quand on va chez les uns ou chez les autres, on prend des tours pour recevoir, et puis après quand on a bien parlé, bien rigolé, une fois qu'on s'est tous bien régalés, l'air autour de nous est comme plein de ces rires et propos partagés, et pour digérer un peu on s'affale dans les canapés et on lit le journal. Alors on commente les nouvelles du monde, ce qui nous surprend, on se lit des bouts d'articles, on s'assoupit aussi un peu... et puis, bientôt... on finit les tasses de thé, on ne se ressert plus... les théières se vident et on retourne aux occupations ou non-occupations dominicales respectives... chacun de son côté, mais content d'avoir passé un délicieux moment ensemble... à la semaine prochaine! bonne semaine!

samedi 10 septembre 2011

mon vieux manteau

C'est l'histoire d'un habit que je portais souvent et à défaut de bien l'aimer, j'en avais l'habitude. Je le connaissais sous toutes ses coutures. Depuis bien longtemps je ne l'ai pas porté, j'avais même oublié son existence.
Quelle n'a pas été ma surprise de retomber dessus. Je me suis rappelé une autre époque, un autre contexte, j'ai reconnu chaque couture, tous ses aspects qui me sont tellement familiers.
Alors je l'ai enfilé, et... étonnement.
Il est devenu trop petit. Je me suis sentie à l'étroit, et mal à l'aise.
Alors je l'ai retiré, et je l'ai renvoyé dans mon passé, parce que c'est là qu'il appartient.
C'est ca le problème quand on grandit. Ca veut dire qu'il faut laisser des habits derrière. Des habits jadis confortables deviennent inconfortables.
Et puis pour l'instant j'ai besoin et envie de sentir le vent sur mes épaules.

jeudi 8 septembre 2011

Fraternité

Ce soir il faisait bon. Je me suis baladée sur les quais. J'ai vu un clochard et j'ai eu envie de lui donner une pièce. Il ne voulait pas de la pièce, il voulait juste qu'on se serre la main. Alors on s'est serré la main.
En partant j'ai compris que c'est lui qui m'avait donné. Et j'ai souri.

Babel

Aujourd'hui j'ai pensé à la tour de Babel. Je me suis dit que chaque langue a ses spécificités, ses subtilités, son vocabulaire spécifique. Même les imprécisions d'une langue en disent long sur la culture sous-jacente. C'est quand même magnifique. Et la langue nous donne les moyens, les mots pour penser, peut être même ressentir, je ne suis pas encore sûre. Nommer c'est donner existence, du moins reconnaître l'existence d'un phénomène. Plus fins sont les pinceaux, plus détaillée est la peinture. Alors il faudrait connaître toutes les langues pour appréhender l'unité. Avons-nous assez d'une vie?

Alors en attendant j'ai décidé de prendre des cours d'une langue qui me tient à coeur. Pour pouvoir lire mon poète préféré dans le texte. Il y a du boulot... Mais tant qu'on a envie d'apprendre des choses, c'est qu'on est en vie (et d'ailleurs où serait cette forme de vie si nous pouvions de manière durable appréhender l'unité?). Et puis c'est bien, comme ca c'est la rentrée pour tout le monde. Je vais pouvoir retailler tous les crayons de mon ancienne trousse, vérifier les stylos plumes et les cartouches, me demander à quoi ressemble le prof et comment sont les autres élèves de la classe, et repartir la tête pleine de nouveaux concepts. Sans pouvoir me plaindre que j'ai trop de devoirs, puisque j'étais volontaire...

Tapis magiques, vous me manquiez trop, il fallait trouver une solution! eh.... c'est en cours. Je cherche encore les profs et tout.

mercredi 7 septembre 2011

N97

J'ai le téléphone le plus capricieux du monde.Il n'en fait qu'à sa tête. Parfois c'est drôle, parfois c'est l'horreur.  Il me coupe la parole en pleine conversation pour des raisons qui défient toute logique. Il a ses bonnes têtes : il plante dès que je regarde certaines photos. C'est un glouton insatiable : il réclame de l'alimentation en permanence, et même les chargeurs, il ne les accepte pas tous, il n'a pas le contact facile. Il reconnait certains numéros et pas d'autres, il a ses chouchous, et nous ne sommes pas toujours d'accord. L'écran est tactile mais il a ses zones d'insensibilité.
Mais il est assez susceptible, je dirais même très soupe au lait. L'autre jour il s'est disputé avec ma poche qui a essayé trois fois, à tort, de rentrer un code PIN : il s'est mis en mode bouderie intensive, quand j'ai voulu m'en servir, il était tout bloqué "veuillez saisir le code PUK". (Oui je sais c'est curieux qu'il me vouvoie alors qu'il est à portée de bras jour et nuit... il est un peu formel c'est vrai). Un dimanche soir évidemment, service clients fermé, évidemment, il a le sens du timing.
Et aujourd'hui, cerise sur le gâteau, il a rappelé le dernier numéro composé sans demander son reste en plein déj-copines et sans que je m'en rende compte tout de suite (impossible de me souvenir de ce que j'ai dit ou pas dit pendant ces 3'43"...). J'encourage toujours l'esprit d'initiative, mais là c'était quand même un peu fort...

"Quand est-ce que tu changes de téléphone ?" On me pose la question souvent. Je suis presque un peu tentée, mais... la dernière fois que j'y ai vraiment pensé il a cessé de planter pendant deux jours presque entiers... alors j'ai repoussé l'échéance... et puis si je passe à l'iphone mes amis co-membres du comité anti-conformistes-iphone vont tomber dans les pommes...
Et puis en fait j'aime bien, que mon téléphone n'en fasse qu'à sa tête. Au moins il a du caractère.

mardi 6 septembre 2011

petit bateau du mardi matin

J'ai envoyé un petit bateau sur la mer
un tout petit bateau
sur une très grande mer
mais je l'ai envoyé avec tellement de sourires
que j'espère que malgré les vagues
il arrivera à bon port
et puis surtout
j'espère que ce petit bateau arrive
juste au bon moment
pour te faire sourire

samedi 3 septembre 2011

il a plu à Paris

parfois l'absence a le gout du silence
qui a juste le goût de manque
lancinant et assourdissant
même quand on se bouche les oreilles
quand même un comble
que l'absence prenne toute la place
et je sais pas quoi faire pour que ca parte
je me dis
que c'est pas juste
que je comprends pas le monde
et certains de tes choix aussi
que c'est twisted
un jour je m'étais demandé ce que voulait dire ce mot
maintenant c'est bon j'ai bien compris
bref
alors je suis allée me promener
une lumière de fin du monde
gris vert
et plutôt tôt que tard
ca n'a pas manqué
le ciel a versé toutes les larmes que je voulais
les nuages en avaient gros sur la patate eux aussi
des grosses gouttes
énormes
qui font splotch splotch sur le trottoir
les rues se sont vidées dare-dare
tout le monde courait partout
c'était chouette
des grosses énormes gouttes chaudes
qui font des dessins
et puis quand il y en a suffisamment
elles se groupent
et font des mini torrents dans les caniveaux
et je fais des paris sur quelle brindille ira le plus vite
ca a rafraichi la ville
chaude encore du soleil de la journée
alors
j'ai respiré l'air tout frais
j'ai marché vite
j'ai retrouvé mon ami Bibou
et on a fait les fous
il m'a fait écouter ses nouvelles chansons
on a parié combien de pas il fallait pour aller d'une colonne à l'autre
avec et sans élan
mais c'était plus facile pour lui parce qu'il est bien plus grand
en faisant gaffe de pas glisser
on s'est fait dégager par des photographes qui voulaient se faire une ligne
mais je ne sais pas en vouloir aux chasseurs de beauté
surtout que c'est en la chassant qu'ils la font exister

on s'est baladés et on a un peu exploré
on a bavardé
et surtout rigolé
sur beaucoup de choses
des sérieuses et des pas sérieuses
et c'était tout décousu
pas de fil conducteur
parce que c'est comme ca que c'est le plus drôle
ca nous a fait des tourbillons d'idées nouvelles
au dessus de nos têtes
heureusement les idées ne craignent pas l'eau
parce qu'il pleuvait encore un peu

et maintenant ca va un peu mieux
j'aime bien quand il pleut
ca fait friser les cheveux
et ca fait sécher les yeux
et maintenant dans Paris rafraichie
je me promène et je te souris

vendredi 2 septembre 2011

les hommes-radio

Aujourd'hui j'ai imaginé que nous étions comme des radios émetteurs, qu'on émettait des émotions, et qu'on recevait des émotions émises (à condition de bien le vouloir), que ca revient à parler et écouter, sauf que le critère de qualité n'est pas la distance mais la véracité, authenticité, sincérité des émotions émises. Qu'il fallait mesurer ses émissions d'émotions, n'émettre que le meilleur parce que dans la mesure où ça revient toujours, et plus on est nu et plus cela est vrai, alors il faut être prudent. C'est comme quand on parle, on peut penser plein de choses, on ne dit que ce qu'on choisit de dire : on ressent plein de choses, on choisit celles qu'on émet. Que ça marche parfois un peu comme un sonar, c'est-à-dire en connaissant exactement ce qui est émis et en écoutant le retour exact de l'émotion émise, on devine à quoi ressemble le côté qui reçoit par différence. Mais c'est encore un peu comme des portes magiques qui apparaissent quand le moment est mûr. Parfois le retour n'est pas immédiat, ça peut prendre du temps, et il faut être absolument disponible quand le retour se fait entendre.
Je répète que "c'est toujours un choix d'écouter et de parler" je crois que c'est la règle numéro zéro ex aequo avec "ce qui est émis reviendra". C'est bizarre qu'on ne nous apprenne pas cela à l'école. C'est important pourtant!
Et qu'il ne faut pas parler pour ne rien dire mais par élan du coeur. Sinon c'est juste de l'énergie gaspillée : pas de caprices! On a toujours le choix d'écouter et de parler. Mais c'est un choix fait par le coeur et non pas par la tête et parfois il y a une différence. D'où l'absolue nécessité d'être honnête avec soi-même et ses intentions.
Alors j'ai regardé autour de moi. J'ai écouté. Tout ce que j'ai pu. Et puis j'ai souri, parce ce qu'on ne choisit pas, c'est le bouton fréquence, (ca c'est régulé par une porte magique). Ni celle qu'on recoit, ni celle sur laquelle on émet (choisit-on sa voix, à qui elle plait? et ses oreilles et ce qu'elles peuvent entendre?)

Et c'est bien comme ca.

l'ami brume

Hier soir
j'ai dîné avec l'ami-brume
il vient de loin, je le vois très peu souvent
et d'ailleurs je ne le connais pas non plus très bien
mais ce n'est pas du tout grave
c'est l'ami brume
comme le haut de la montagne verte qui dépasse de la brume.
Le révélateur dévoile
L'ami brume envoile
La brume qui arrondit
les formes, le visage, les mots et les manières
la brume qui enchante
elle ravit et disparait
en laissant un souvenir serein
l'ami-brume est pareil
ce qui est rigolo
avec l'ami brume qui invente tout
c'est qu'en même temps qu'il invente tout
c'est comme si c'était un rituel
qui avait mille ans
on a mangé lentement
en respectant chaque bouchée
nous avons dîné ensemble
dans un tout petit restaurant
que je ne connaissais pas
tout petit certes
minusculissime
mais il a changé de taille
au cours du dîner
au fil des bouchées
au défilé d'anecdotes
de tous les pays
de toutes les couleurs
de toutes les litotes
il s'est agrandi
pour laisser la place
au fur et à mesure
que l'ami brume me racontait
et me montrait, presque,
des contrées lointaines et des moeurs bizarres
la route des thés verts blancs noirs fumés
les moeurs alimentaires et autres étrangetés...
alors on a dîné
c'est la brume qui fait ca
c'est passé ni vite ni lentement
c'est passé
rond et lointain
maintenant je me demande presque
si ca s'est vraiment passé
mais en sortant du restaurant
c'était calme olympien
et je me dis
comme à chaque fois
que c'était chouette de dîner
avec mon ami brume

le maître et l'élève

Une solitude de plus sur le compteur...

quand l'élève pose une question à laquelle le maître ne sait pas répondre, ou qu'il fait une remarque que le maître ne comprend pas.

L'élève privé de tuteur se sent démuni. Le professeur privé de son savoir se sent impuissant.

Ils vont se rendre compte de se qui se passe, peut être ils vont repousser l'échéance, faire comme si ce moment n'avait pas existé. Peut être ils vont réussir une ou deux fois, mais tôt ou tard c'est inéluctable.
Ils vont se regarder, se sourire tristement. Le maître va répéter son éternel bon conseil, une dernière fois, pour se donner contenance. Ils vont penser à toutes les heures de dur labeur pour progresser, comprendre, peaufiner, apprendre et inventer, ils vont se dire que c'est fini. Ils vont savoir ce qui se passe et ce sera un moment sans précédent.

Une solitude de plus sur le compteur...mais quelle victoire finalement! le maître a révélé un talent, poli et orienté, patiemment toutes les facettes qu'il fallait pour que son élève s'améliorât et atteignît le meilleur niveau possible! quelle fierté pour lui de l'avoir accompagné si loin. Sa générosité l'honore. Et l'élève qui a écouté, épousé les idées si bien qu'il a réussi à dépasser... non le maître, mais lui-même. Il n'est pas seul, ce qu'il a appris est toujours en lui.

Je souhaite à l'élève que la tristesse d'être seul laisse place à la reconnaissance et la gratitude pour tout le savoir que lui a apporté le maître tant respecté et dont la patience l'a généreusement porté à bout de bras.
Je souhaite au maître que l'impuissance de se sentir dépassé laisse place à la fierté d'avoir décelé et poli un potentiel aussi loin qu'il pouvait.

Que la confiance du maître dans l'élève soit la tape encourageante dans le dos pour aller voir plus loin dans le monde et apprendre encore, même si ce sont des choses qu'il ignore, désormais. Et que la gratitude de l'élève soit la tape dans le dos pour continuer à enseigner si généreusement, à d'autres élèves, même si ce sont des choses qu'il sait déjà, désormais.
 Et que le respect et l'amitié l'un pour l'autre survivent au changement de statut, qui est complètement périssable, parce que ce n'est pas grave, qui est qui.